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Bivouac au Dragon

Nous avons décidé de monter un bivouac au Dragon pour y passer 3 jours et continuer de creuser juste avant la salle terminale avec la cheminée. Voici le compte rendu de cette désobstruction.

Mardi 19 juillet

Nous sommes partis d’Albeuve à 13 heures pour monter surchargés sous une pluie digne d’un mois de novembre. Arrivé au pied de la falaise à 17h30, nous avons vite enfilé les baudriers dans des crottes de chamois. Anne-Cécile réitère son « insigne bouquetin » en installant la corde dans la partie basse. Puis nous commençons l’ascension le long du câble, chargé comme jamais, toujours sous la pluie battante. Cela nous prend presque une heure. Arrivé en haut vers 19 heures, nous sommes mouillés jusqu’aux os et donc bien content d’enfiler nos sous-combinaisons chaudes et sèches.

Nous installons le bivouac. Pierre va chercher de l’eau en bas du premier puits et trouve un petit filet d’eau qui permet de remplir nos bouteilles pour cuisiner. Ce soir-là au menu : polenta-sauce tomate, cuisiné au chaud dans le sac de couchage. A 21 heures la fatigue a vaincu notre courage et nous décidons de remettre au lendemain la creuse : demain matin c’est sûr, on se réveillera tôt, motivé et reposé. Anne-Cécile n’a même pas le temps de se laver les dents que Pierre ronfle déjà…

Mercredi 20 juillet

Réveil très tôt !!! Dans l’après-midi, après une nuit plus (Pierre) ou moins (Anne-Cécile) reposante remplis de cauchemars d’inondation pour une certaine. Surprise : Pierre a eu droit à un lavage de pied gratuit suite à la formation d’une gouille sous son matelas de sol. Le cauchemar est devenu réalité (!). Rien de grave, mieux vaut profiter de la chaleur du sac de couchage pour cuisiner et « déjeuner » au lit. Rien de mieux que du porridge pour bien commencer la journée. Pendant ce temps-là l’eau continue à monter et un repli stratégique s’impose. On a à peine le temps de ranger nos affaires que la gouille se transforme en lac et qu’il y a 30 cm d’eau à l’endroit où on dormait : Voilà une crue au Dragon ! Pour la prochaine fois, si on veut faire des grasse mat’, il faudra prévoir un bateau gonflable à la place du tapis de sol !

Ceci ne suffit pourtant pas pour nous faire abandonner, et nous partons pour creuser, remettant le problème du futur bivouac au soir. Au bas du premier puits la petite fontaine c’est transformé en cascade qui est à l’origine du lac. Il y coule beaucoup d’eau : une dalle inclinée contre la paroi collecte une quantité importante d’eau. Cela forme à son extrémité une cascade. La partie suivante est relativement sèche, comme d’habitude.

Nous avons finalement atteint notre destination et commençons à creuser au bas de l’éboulement. La creuse se fait dans de l’argile bien collante contenant des pépites de calcaire. Nous avançons tranquillement motivés par un courant d’air intermittent. En plus, nous creusons plus dans l’éboulis, mais sommes passés à une vrai galerie ! Après 3 mètres de creuse (le tunnel fait maintenant 5-6 mètres) le noir au fond est vraiment noir-noir… un bloc tombe – de l’autre côté – dans du vide ! Quelques coups de pelle et nous voilà sur un balcon en haut d’un ressaut de 4 mètres avec une belle vue sur une petite salle de 5×2 mètres haut de 5 mètres. Sur la droite une dalle inclinée part vers l’inconnu : aucun de nous n’a la force pour tenter son insigne chamois et aller voir ce qui se trouve en haut de ce laminoir…

Après la désescalade du ressaut nous voyons que ça continue dans un méandre étroit bouché par quelques blocs. Ceux-ci ne résisteront pas longtemps, et donnent l’accès au méandre long de 5-6 mètres. A la fin du méandre la galerie s’élargi un peu avant d’être à moitié bouché par de l’argile et des gros blocs. Depuis la fin on peut voir que la galerie continue vers le bas. Beaucoup de noir malheureusement inaccessible. Les quelques coups de pelle de deux désobeurs fatigués de toutes ces émotions de première ne suffisent pas pour libérer la suite.

La fatigue commence à se faire sentir (il est déjà 19 heures) et nous décidons de rebrousser chemin en étant conscient du problème de bivouac qui nous reste à régler. En arrivant à l’entrée de la grotte, nous voyons qu’il a arrêté de pleuvoir et que, du coup il fait plus sec dehors que dedans. Nous décidons donc de descendre pour éviter de devoir faire la falaise et l’éboulement sous la pluie éventuelle du lendemain.

Après une descente qui nous semble sans fin (sous un ciel dégagé pleins d’étoiles) nous arrivons à la gare d’Albeuve après minuit : il faut attendre 5 heures pour le premier train… Trop fatigué pour cuisiner nous nous installons dans la salle d’attente pour dormir un peu.

Pierre Pellaud et Anne-Cécile