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Nouvelles du fond – Nouveaux puits

Voici le récit de la mythique expédition de début juillet de Florian et Alex, qui ont effectué une pointe de plus de 24h dans des conditions fort difficiles au fond du réseau . Résultat : un entier kit de corde est posé dans une nouvelle séquence de puits qui se développent à partir de la bifurcation de 2019 (-611 m) et arrêt sur manque de corde!!


Certains étant impatients d’avoir des nouvelles de la pointe au fond, voici un petit compte-rendu presqu’à chaud.

Vu la météo favorable avec risque d’orage nul, nous nous décidons pour l’option d’une pointe au fond,  pour explorer la galerie que les précédents explorateurs (de circonstance) étaient sur le point de parcourir avant d’être rappelés par la voix de la sagesse…

Ciel couvert le matin, c’était prévu et nous faisons confiance en Méteo-Suisse pour la suite. En attendant, c’est bien commode pour monter au frais. Par contre il y avait plus d’eau sous terre qu’on pouvait s’y attendre – ce n’est pas du tout la sécheresse. Entrés dans le gouffre vers 11h30. Nous coupons l’eau après l’Aquaboulevard en déviant le tuyau dans l’actif naturel. Mais en descendant le puits sec, nous entendons de nouveau un bruit d’eau quelques puits plus bas. En fait il y a un délai considérable avant que le débit ne diminue, on dirait que nous sommes descendu plus rapidement que l’eau car nous n’avons pas vu le débit diminué pendant toute la descente. Nous faisons attention à ne pas trop se mouiller en dégageant rapidement la base des puits, il faut aussi faire attention à ne pas tremper le kit dans les gouilles à chaque « atterrissage ». En rejoignant l’actif, nous passons à côté du stock de corde et de broches, mais ce n’est pas notre mission aujourd’hui.

Nous réorganisons le matériel au bivouac de -480 en y laissant un des deux kits, j’embarque aussi au passage un petite corde de 13m et une dizaine d’ammarages. Vient ensuite la partie redoutée des conduites argileuses, avec l’espoir que tout soit nettoyé comme on nous l’a rapporté. Alors effectivement le nettoyage par l’eau est efficace, mais il y encore env 50% de passages argileux là où l’eau passe par ailleurs, dont le passage latéral après l’ancien fond (au bout de la ligne de tir de 100m), qui n’est de loin pas mon préféré. On enchaîne les puits inclinés à ne pas en finir, il y aurait du souci à se faire pour la remontée si nous y pensions, mais on y pense pas (ou pas trop) justement, nous voulons savoir quelle sera cette fabuleuse suite qui nous nargue depuis tant d’années ! Bon, arrivé au dernier puits avec les cailloux aux sol (oui je sais, c’est en fait plutôt une galerie inclinée …) et à la fameuse bifurcation qui donne sur la nouvelle galerie découverte l’année précédente, c’est un peu la déception … c’est pas plus grand et même plutôt moins, et encore argileux …

En fait je me suis enfilé directement dans la galerie à droite vers le bas sans me rendre compte de la bifurcation. Alex me suit rapidement avec le kit de corde aimablement laissé là à disposition des candidats explorateurs. Nous sommes déjà trempés par l’argile mouillé sur nos combis tissus et collons de partout. Quand Alex va voir à gauche de la bifurcation, je suis en train de considérer une section rectiligne pas très large qui à l’air de se rétrécir encore sur des bourrelets d’argile. Le moral prend un coup de mou et il y a un moment d’hésitation. Profitant d’un moment de silence, j’entends un petit bruit venant de la suite, on aurait dit des chants d’oiseaux … pic … cui … pic … cui … Serait-il possible qu’il y ait là une sortie miraculeuse juste après ce passage, avec une délivrance inespérée ? Bon le côté réaliste penchait plutôt pour un bruit par un petit filet d’eau, mais décision est prise de continuer, enfin pour ma part car Alex est maintenant en train d’observer le passage où je suis et il n’a pas l’air trop enchanté. A défaut de pelle, j’attaque les bourlets d’argile à la main, on peut bientôt passer. Il y a un tournant et ça a l’air correct derrière … alors c’est parti ! Ça passe facilement grâce à la « lubrification » argileuse, heureusement que c’est quasi plat pour le retour.

Et juste derrière … nouvelle bifurcation ! En amont, base d’un puits argileux, et en aval, suite propre et assez confortable pour se mettre debout ! Jet de caillou, boum-badaboum-badaboum à n’en plus finir, il va falloir équiper ! Test du passage en sens inverse pour aller chercher le kit avec le perfo, ce n’est pas vraiment pire qu’ailleurs.
Alex se laisse facilement convaincre qu’il sera mieux l’autre côté et arrive avec le kit de corde. Double amarrage, puis fractio au plafond pour éviter les frottements, puis encore fraction, encore un, et ça continue … Petite margelle, Alex continue l’équipement, ça descend et ça tourne à gauche et à droite, ça fait penser à l’actif après le lac, en un peu plus grand et avec plus de silex.

Il y a des arrivées d’eau multiples au plafond (impénétrables), ça devient vraiment actif ! Le risque de dépôt d’argile est désormais réduit à néant dans cette galerie !
Toute la corde y passe sans qu’on ait le temps de s’en apercevoir, nous avons encore la corde de 13m, mais ça ne nous mène pas beaucoup plus loin. Arrêt au milieu d’un puits sur une margelle équipée autant que possible hors crue mais on commence à se faire arroser par les éclaboussures. On aperçoit la suite avec une petit portion plus plate et un passage bas ponctuel, d’après le bruit d’eau il semblerait que ça continue à descendre encore derrière.

Pourtant il faudra bien arrêter de perdre de l’altitude si on ne veut pas se retrouver bientôt sous le niveau de la plaine ?!?! Mon impression est que la grotte est déjà perceptiblement plus chaude qu’en montagne. Je ne pouvais m’empêcher d’observer si je reconnaissais par hasard le puits glissant de la grotte du Roc … Il reste un dizaine d’amarrages que nous laissons sur place (env. la moitié avec goujons).

C’est maintenant le temps de remonter, je ne sais plus trop à quelle heure (19h-22h ?) mais Alex s’en souvient probablement. Par bonheur, Alex semble motivé pour monter en grande partie le kit dans les puits argileux, je suis derrière et nous nous le passons dans les endroits délicats. Puits après puits, nous finirons bien par sortir … juste à temps pour un magnifique lever de soleil !

Force de reconnaître que je ne m’étais pas bien préparé pour la partie argileuse, j’aurais du prendre la combi Aventure Verticale comme la dernière fois et des longs gants bleu étanches (malheureusement bouffés par les souris). Nous avons bien souffert du froid et même la montée ne me réchauffait pas vraiment. Tous les deux nous avons eu mal au poignet, peut-être à force de manipuler le matériel et le kit, avec les mains et bras refroidis par les gants mouillés. Mes bouts des doigts se sont engourdis et ont perdu la sensibilité, encore maintenant. A prendre en compte pour les prochaines explorations. Pour ma part, une bonne pause s’impose.

En résumé: fatigués mais heureux de la belle découverte !

Florian et Alex